L’histoire du savon est intimement liée à l’histoire de l’eau. Dès le XVe siècle, l’industrie du savon se développe considérablement dans le sud de la France, avec l’inauguration de la première fabrique dédiée en 1430, à Toulon. L’aventure continue sous Louis XIV, qui fixe lui-même les règles de fabrication du Savon de Marseille, principes encore perpétués aujourd’hui : sans additif, sans conservateur et, surtout, sans parfum, le précieux Graal est composé d’huile végétale, de grignons d’olive et de soude, qui permet la saponification des huiles.
Et pourtant, par peur de l’eau et de ses vices, on continue de lui préférer le parfum en poudre. Celui-ci masque les mauvaises odeurs… mais n’éradique pas les microbes. Le savon est longtemps réduit à un usage ménager - pour laver le linge à l’eau courante - car la rumeur diabolise le bain : avec l’arrivée de la peste à Marseille en 1347, tout porte à croire que l’eau chaude ouvre les pores et facilite la contamination. Ce n’est qu’au XVIIIe siècle que l’ablution redevient à la mode, moment d’entre soi particulièrement apprécié par les milieux libertins. Les « W.C. à l’Anglaise » et les bidets font leur apparition, croqués par les maîtres de la peinture classique : Boucher ou Eisen.
Énième fantaisie des cabinets de toilette bourgeois, le savon devient argument de masse au 19e siècle, avant l'émergence de l' « hygiène publique ». Le Conseil de Salubrité, porté par les découvertes de Pasteur, multiplie les campagnes d’affichage et préconise la stérilisation des biberons, le brossage de dents ou encore la vaccination. Bien sûr, le savon s’en frotte les mains : la révolution industrielle aidant, sa production en France s’élève à plus de 12 500 tonnes par an. À Marseille, les savonneries diversifient leurs méthodes et emploient tantôt des huiles d’olive locales, tantôt des huiles de palme ou de coprah importées des colonies. Les marques de savon fleurissent, et les parfumeurs, tels Gellé Frères ou Jean-Vincent Bully, passent maître dans l’art du savon de toilette.
CAR ON PEUT ÊTRE PROPRE ET BEAU : C’EST TOUTE L’HISTOIRE DES COSMÉTIQUES.
Mathilde Berthier